Pour
évoquer l’assassinat de l’enseignant du collège de Conflans-Sainte-Honorine,
nous
avons choisi le texte de la Coordination nationale de l’Union Juive Française
pour la Paix.
« De
l’art d’utiliser le fanatisme religieux pour légitimer le racisme d’Etat
L’assassinat atroce d’un enseignant par
un jeune fanatique nous émeut et nous bouleverse tous. Les enseignants, en
général méprisés par le pouvoir, s’interrogent sur les conditions d’exercice de
leur métier et sur la liberté d’enseigner. Le jeune terroriste a agi avec les
motivations d’un fanatique religieux, qui prétend se revendiquer de l’islam. Il
faudra dire un jour les ravages psychologiques qu’auront faits guerres et
répressions génocidaires en Tchétchénie.
Ce
crime atroce se double désormais d’une exploitation sans vergogne.
Autrefois,
le pouvoir protestait contre l’idée qu’il y aurait un racisme d’Etat et niait
l’existence d’une islamophobie. A présent, ce même pouvoir veut interdire de
lutter contre l’islamophobie, en s’en prenant à des associations musulmanes,
dont le CCIF (Collectif de lutte contre l’islamophobie en France), calomnié, sali,
injurié parce qu’il veut faire respecter les droits des citoyens musulmans en
France et lutter contre les discriminations.
Il
y a quelque chose de totalitaire dans la nouvelle étape du discours raciste et
islamophobe d’Etat qui vient d’être franchie avec l’introduction frauduleuse
dans le débat national du concept du « séparatisme » supposé
qu’entretiendraient nos concitoyens de culture musulmane, croyants ou non, avec
la Nation.
De
quelques fanatiques, on passe à des groupes entiers qualifiés d’islamistes,
puis à toute organisation indépendante s’appuyant sur l’Islam, comme le Secours
catholique s’appuie sur le christianisme, des ONG comme Baraka City, une
organisation antiraciste comme le CCIF. D’ennemis intérieurs hier, les voilà
aujourd’hui accusés d’entretenir dans leurs rangs un projet de séparatisme
avec, à terme, une volonté de créer des espaces de non-droit où seules des lois
prétendument inspirées du Coran remplaceraient les lois de la République. Vieux
discours de l’extrême-droite parés de nouveaux oripeaux… Le véritable
séparatisme, c’est la désignation assumée à la vindicte générale de pans
entiers de notre société au seul motif qu’ils sont musulmanes et musulmans.
L’utilisation
de la notion de « liberté d’expression » jusqu’à la nausée par un
pouvoir qui la brime depuis des années, en instaurant des lois d’exception, en
interdisant ou en réprimant les manifestations populaires, et désormais en
appelant à l’interdiction d’organisations humanitaires ou militantes, a quelque
chose d’obscène.
Nous
connaissons les effets de cet engrenage criminel du racisme pour en avoir
nous-mêmes subi les conséquences. La généralisation des discours antimusulmans
à chaque fois que se produit un acte criminel d’un jeune égaré constitue, en
quelque sorte, une victoire des auteurs de ces actes contre la démocratie.
L’atmosphère empoisonnée d’aujourd’hui peut permettre de comprendre ce qui a dû
se passer en France et en Allemagne pendant les années 1930. Comment une
société entière a pu être, petit à petit, contaminée par des discours
politiques et la presse antijuive, pour se retrouver embrigadée dans une
croisade exterminatrice.
Plus
qu’à tous autres, il nous appartient d’alerter nos concitoyens sur les dangers
qui menacent nos sœurs et nos frères musulmans, et plus largement notre société
toute entière. Le temps nous est compté si nous ne voulons pas que se produise
à nouveau une catastrophe.
Nous
appelons les femmes et les hommes de bonne volonté, épris de justice et de
respect mutuel, à refuser ce discours islamophobe – ce discours de haine
raciste gros de dangers – à faire front, toutes et tous ensemble, contre le
racisme qui risque de submerger notre société et de l’emporter très loin des
valeurs démocratiques et républicaines qu’elle prétend défendre ».
La
Commission Antiracisme Politique, pour la Coordination
nationale de l’UJFP, le 19 octobre 2020
Pour
en savoir plus sur l’UJFP : ujfp.org